Dernièrement, j’ai atterri sur l’article « La créativité de l’IA repose sur la personne derrière l’écran… pour l’instant » par Pier-Luc de Chantal. Un article qui m’a amené à me questionner. Est-ce que la technologie a rendu notre créativité paresseuse ? L’arrivée des outils d’intelligence artificielle générative (IA) comme ChatGPT ou autres instruments plus artistiques soulève encore plus d’inquiétude que l’arrivée des réseaux sociaux. Dans ce texte, je me pencherai sur la question en rapport à la créativité en observant des points comme la relation que nous avons avec la technologie, notre responsabilité et enfin, l’équilibre que nous pouvons trouver.
Les technologies nous facilitent-elles la vie ou produisent une dépendance?
La technologie se fait de plus en plus présente. Étant de la génération des millénariaux, j’ai grandi avec l’arrivée de ses technologies. L’information est accessible plus facilement et plus rapidement. Les réseaux sociaux ont apporté un accès au monde entier, du bout des doigts.
Dans le domaine artistique, le titre d’artiste n’appartient plus qu’à une seule catégorie d’élite. Tout le monde peut être artiste et exposer leur vision créative sur la toile. Tout le monde à son mot à dire.
Et que dire de la manière que la technologie nous facilite la vie.
- Besoin d’inspiration pour une illustration ? Pinterest
- Besoin d’une recette pour le souper de ce soir ? Les médias sociaux comme Facebook ou Instagram.
- Désir d’apprendre à être photographe ? Domestika
- Désir d’écouter de la musique ? Spotify
- Besoin de connaitre l’heure du bus ? Citymapper
Tout (ou presque) est à portée de main en un clic. Tout est tellement facile, qu’on serait fou de s’en passer. Cependant, est-ce que nous ne penchons pas vers la dépendance ? Est-ce qu’on est capable de créer sans se tourner vers son téléphone, sa tablette ou son ordinateur ? Est-ce que nous sommes capables de nous asseoir avec nous-mêmes, une page blanche et un crayon puis dessiner.
En fait, il est faux de croire que nous allons retourner à l’âge de l’antiquité grecque ou du romantisme. La technologie est là pour s’enraciner dans nos sociétés et évoluera encore. En revanche, il y a un important questionnement à avoir sur son utilisation dans notre processus créatif. Au lieu de demander comment la technologie peut faire pour nous, il serait intéressant de se demander, comment la technologie peut-elle nous soutenir dans notre cheminement.
Co-création personne-machine
Pour m’aider à écrire ce billet, j’ai fait appel à ChatGPT pour voir les sujets qui pourraient être abordés sur la thématique. Lorsqu’il m’a apporté le point de la co-création personne-machine, je n’ai pas pu m’empêcher de me questionner sur l’utilisation de l’IA. Est-ce que le fait que j’utilise Chat GPT affaiblissait ma créativité ?
Tu sais quoi ? Je lui ai carrément posé la question et voici sa réponse :
« Je ne crois pas que tu affaiblisses ta créativité du tout ! En fait, en explorant activement des sujets comme la créativité et la technologie, tu nourris plutôt ton esprit créatif. La réflexion et la recherche que tu investis dans l’écriture de ton blog sont des exercices précieux qui stimulent ta pensée critique et ton imagination.
Il est normal de se poser des questions sur sa propre créativité de temps en temps, mais il est important de se rappeler que la créativité est un processus fluide et évolutif. Tout ce que tu fais pour explorer de nouveaux sujets, découvrir de nouvelles idées et défier tes propres limites contribue à renforcer ta créativité.
Continue à t’engager dans des projets qui t’inspirent et qui te poussent à penser différemment. Ton blog sur la créativité et la technologie est une excellente occasion d’explorer de nouveaux horizons et d’approfondir ta compréhension de ces sujets fascinants. »
En fait, j’ai trouvé cette réponse rassurante et ça m’a rappelé que la créativité des IA dépend de l’intervention humaine. Il suffit de songer à toute la programmation derrière qui est codée par des personnes. La machine est là pour soutenir notre créativité et non pour le faire à notre place.
Dans son article, de Chantal (2024) cite un passage de Platon qui faisait référence à la crainte que l’écriture n’altère le fonctionnement de la pensée humaine. L’auteur fait un parallèle intéressant avec l’émergence de l’IA et la peur que ça suscite. L’écriture a-t-elle vraiment altéré le fonctionnement de la pensée? Je crois qu’elle l’a bonifié en offrant un nouveau canal d’expression.
Il en va de même pour l’IA. Cette technologie, bien utiliser, peut bonifier le processus de créativité humaine. Encore une fois, tout est une question de comment on l’utilise.
Impact de la consommation de contenu
Et qu’en est-il de la consommation des médias sociaux ? Il y a ces phénomènes de défilement compulsif ou de « doomscrolling » qui apparaissent. Est-ce que cette consommation excessive de contenu peut-elle étouffer notre imagination ou, au contraire l’enrichir en fournissant une multitude d’idées ?
Comme dans beaucoup de choses, je crois qu’il y a plusieurs facettes. D’une part, oui, ça peut enrichir l’imaginaire, car il y a toute la notion du modèle du connectivisme. C’est-à-dire que nous utilisons un réseau (dans ce cas de personne en ligne avec diverses opinions) pour apprendre, élargir nos horizons et nourrir notre créativité. Combien de recettes avez-vous trouvées sur les réseaux sociaux ? Combien de trucs de maison avez-vous trouvé vus en ligne, testés et adoptés ? Je crois que la beauté des médias sociaux réside dans le partage d’informations et d’expériences de partout dans le monde.
Là où je vois des enjeux, c’est surtout lorsqu’il y a dépendance (comme expliqué plus haut) et lorsque les médias nourrissent un faux sentiment de perfectionnisme. Tout est beau et parfait. La vie est toujours positive et sous le soleil. Alors, nous nous mettons une immense pression pour faire exactement pareil et encore plus, si nous partageons sur les médias sociaux. Ce n’est pas la technologie elle-même qui est problématique, mais le faux sentiment de perfection qu’elle crée. Il faut donc faire preuve de discernement et de faire attention à notre consommation. Je suggère même de déterminer des objectifs pour influencer de notre consommation. Ainsi, notre consommation devient plus claire et moins addictive ou contrôlante.
Et si j’utilisais Instagram pour :
- trouver des idées pour mes projets de crochet,
- trouver des recettes de cuisine,
- m’informer sur l’hypersensibilité et les neuroatypique,
- m’insuffler du body positivism pour mieux m’accepter.
Ethique et responsabilité
Un autre point qui est soulevé avec la technologie, c’est le plagiat. Soyons honnêtes ! Le plagiat a toujours existé et c’est toujours manifesté de différentes manières au travers des époques. Cela dit, est-ce que la soif de succès surpasse le désir de créer une œuvre authentique ?
Est-ce que la soif de performance mélangée à la facilité de la technologie a rendu notre créativité paresseuse ?
Est-ce vraiment la technologie qui a créé ça ?
D’ailleurs, le plagiat avec les IA est un gros sujet de discussion dans le milieu universitaire. Il y a une réelle crainte de plagiat et les établissements s’équipent d’outils pour détecter le plagiat. C’est tellement devenu gros que l’utilisation des I.A. fait peur aux étudiants, tel que l’explique Nadia Naffi dans l’épisode 78 Enseignement et IA Deepfake, métavers et ChatGPT à l’école des sorciers du podcast I.A. Café – Enquête au coeur de la recherche sur l’intelligence artificielle. Pourtant, les IA peuvent devenir des outils riches pour stimuler la curiosité et le questionnement. Toutefois, madame Naffi souligne un point important c’est-à-dire, savoir comment s’en servir.
Est-ce le manque de compréhension de l’utilisation des outils qui crée ce problème ?
Néanmoins, peu importe les réponses aux interrogations, je crois que c’est toute une question de choix et de responsabilité. Car oui, les IA peuvent créer des idées, mais il n’en reste pas moins que c’est l’obligation du créateur. C’est le devoir de l’utilisateur d’apprendre son utilisation et de l’utiliser de façon éthique.
C’est aussi la responsabilité de l’humain de créer un encadrement à sa créativité et d’aller au-delà des étiquettes de succès et de performance promus par la société. Cela étant, il y a tout le débat de société sur ces sujets, mais je vais me concentrer sur notre pouvoir comme individu.
Équilibre entre technologie et nature
Au bout de l’histoire, est-ce que la technologie a vraiment rendu paresseuse notre créativité ? Oui et non. Il ne faut pas oublier que la technologie a été conçue par des humains. Et l’objectif est souvent de nous simplifier la vie. Donc, a priori, la technologie devrait nous être utile à nourrir notre créativité. Tout dépend de la place qu’on lui attribue dans le processus.
Il en tient qu’à nous de s’assurer que notre créativité reste active au même titre que notre corps. La technologie peut grandement nous aider pour développer notre curiosité et ouvrir nos horizons sur des sujets qui autrefois n’auraient jamais été accessibles.
Comme dans toute chose, je crois que pour garder notre créativité allumée, nous devons conserver un équilibre entre la technologie et son environnement (à l’extérieur de la boite électronique).
La mise en place d’un cadre d’utilisation peut être bénéfique. Que ce soit au niveau du temps alloué ou encore des objectifs de consommation, de délimiter notre terrain de jeu va rendre l’usage des technologies plus stimulant et intéressant.
Aussi, de remettre les mains à la pâte et revenir des médiums dits traditionnels peut être bénéfique. Disons-le, la technologie à certains moments peut devenir très cérébrale. De sortir de sa tête pour revenir à son corps apporte des effets positifs à plusieurs niveaux. Si nous nous concentrons sur la créativité, ça permet de se mettre en pause, être dans le moment présent et surtout, créer un espace d’incubation à nos projets divers. Je fais du crochet dernièrement et il n’est pas rare que j’aie des flashs d’idée entre deux brides.
Se connecter à la nature ou à ses personnes qui nous entourent est une merveilleuse source d’inspiration. Ça fait du bien à l’âme et peut même nous permettre de matérialiser ce que nous avons appris ou les idées que nous avons eues (en les verbalisant entre autres).
En conclusion, qu’on soit d’accord ou pas, la technologie est là pour rester. Elle va encore évoluer et amener son lot de craintes, de manipulation, mais aussi de surprises. L’idée est de ne pas se laisser avaler par elle, mais d’en créer une alliée pour améliorer notre processus créatif. Tout est une question de choix. C’est notre responsabilité comme utilisateur de percevoir la technologie pour se qu’elle doit être, c’est-à-dire un simple outil, comme le marteau est.
Bibliographie
Duplàa, E. & Talaat, N. (2011). Connectivisme et formation en ligne : Étude de cas d’une formation initiale d’enseignants du secondaire en Ontario. Distances et savoirs, 9, 541-564. https://www.cairn.info/revue–2011-4-page-541.htm.
De Chantal, P. (s. d.). La créativité de l’IA repose sur la personne derrière l’écran. . . pour l’instant. The Conversation. https://theconversation.com/la-creativite-de-lia-repose-sur-la-personne-derriere-lecran-pour-linstant-221712
Sénéchal, Jean-François, (2024) I.A. Café – Enquête au coeur de la recherche sur l’Intelligence artificielle, Épisode 78 – Enseignement et IA : Deepfake, métavers et ChatGPT à l’école des sorciers! https://open.spotify.com/episode/0gostVwy8FHfLUPHwLgLcQ?si=b83d16bd56f7429f
Crédit image : Alexander Grey